© Laurent Monlaü / Signatures

La galerie Signatures présente une installation photographique et vidéo de Laurent Monlaü, réflexion sur la nature et l’effondrement écologique programmé.

L’exposition de Laurent Monlaü s’articule autour de plusieurs séries : « La diagonale du plein », « Le ciel peut attendre », « Les forêts sauvages », « Archéologie du capot d’une Nissan Qashqaï », « Les genêts », « Tableaux de chasse » et « Prélude à la fin du monde », autant d’approches différentes liées par un fil rouge celui de la nature vue sous plusieurs prismes.L’anthropocène, la faillite écologique nous laissent étrangement tétanisés, effrayés. La haine, les guerres et la brutalité politique actuelles sont les symptômes cauchemardesques de notre déni et de nos peurs refoulées. Tout semble s’écrouler, notre système s’affranchit de l’idéal démocratique qui fut son socle, nous avons égaré les utopies, plus rien ne fait sens, aucune foi dans le futur ne semble peser face à l’abandon.

Alors il nous reste la poésie, les mythes nouveaux d’un vieux monde disparu, les allégories païennes, l’observation des coléoptères, la contemplation tranquille du cosmos, l’écoute des arbres et l’attente émerveillée des métamorphoses invisibles au cœur d’une clairière.

Au cours des quinze dernières années, la nature est le sujet de Laurent, il photographie des forêts primaires à travers le monde pour sa série « Les forêts sauvages », puis poursuit son étude chez lui dans le Tarn au cœur de la forêt. Il réalise des portraits d’insectes « Prélude à la fin du monde ». Avec « L’Accident, » il propose une vision macrocosmique d’insectes écrasés sur sa voiture. Son travail le plus récent, interroge la relation au vivant, par un dialogue entre les habitants d’un bourg en Auvergne et des insectes géants qui peuplent des paysages étranges. Entre chien et loup, illuminés par les images colorées des insectes, les acteurs se métamorphosent en chimères, en animaux totems. Un dialogue baroque, pop et chamanique, symbolique de l’effondrement annoncé.

« Pour moi, une écriture photographique qui se répète, ça m’a toujours ennuyé profondément. À un moment, je me suis dit que ce qui est plus important, c’est d’avoir un sujet fort sur lequel on s’appuie. J’habite au cœur de la forêt depuis une petite dizaine d’années, dans le Tarn et c’est là où j’ai fait ces images après avoir travaillé sur des forêts dans le monde entier, où j’avais commencé ce travail sur la nature pour arriver à être à l’écoute du vivant, parce qu’on en fait partie. J’ai commencé à travailler sur les insectes, je les photographiais dans mon studio, juste un fond blanc et c’est un vrai portrait. Et après, je les libère, ils sont tous vivants. Et après, j’ai travaillé sur une autre série qui était « l’accident », c’est-à-dire les insectes écrasés sur les voitures. Il y a 30 ans, en traversant la plaine de la Croix pour aller à Arles, j’avais mon pare-brise qui était maculé, il fallait que je le nettoie, et ça n’arrive plus. Les insectes disparaissent, je l’ai remarqué même chez moi, ils disparaissent. Donc j’ai photographié en macro-photographie ma voiture et je me suis rendu compte que la peinture émaillée, quand on donne un coup de flash latéral, ça ressort comme une voie lactée, avec ces éclaboussures d’insectes, ce qui donnait une vision un peu cosmique d’un tout petit animal.

De fil en aiguille, j’ai commencé à travailler sur d’autres séries, comme pendant le Covid, des ouvriers qui s’appellent les genêts, des premiers de cordée, une interrogation sur le fait que ce chaos climatique qui entraîne des virus mondialisés, c’est aussi vraiment une interrogation sur la nature. Il y a aussi les arbres. J’ai toujours eu envie de photographier la voie lactée, mais je ne savais pas comment faire. Je voyais ces arbres en hiver, ce sont des moments magiques, ça change tout le temps, tout ça bouge, c’est un travail qui est très jouissif. Comme mon travail sur les forêts sauvages, où j’ai photographié les grandes forêts primaires, sans aucun aspect scientifique, ça ne m’intéressait pas, je me suis immergé dans ces espaces que j’ai photographiés détail après détail pour ensuite recomposer l’image, ce qui donne un aspect hyperréaliste à ces images. Je me suis aussi intéressé à la chasse parce que c’est aussi ça la nature, ce n’est pas que les insectes et les arbres, c’est aussi la brutalité du monde et la vie des animaux que j’ai voulu photographier. Et enfin, il y a une série faite à Saint-Éloy-les-Mines, dans un bar associatif, le Bancal, où j’ai projeté mes photos d’insectes sur des visages qui se métamorphosent en une danse baroque, pop et chamanique, un dialogue avec leur environnement, la forêt qui est autour de cette ville. » Laurent Monlaü

Exposition jusqu’au 30 novembre 2025, galerie Signatures, Paris

Le site de Laurent Monlaü

 

Gilles Courtinat
Les derniers articles par Gilles Courtinat (tout voir)
Si cet article vous a intéressé... Faites un don !