Depuis son invention, la photographie est une quête perpétuelle pour saisir le mouvement permanent du monde qui nous entoure et présente une proximité forte avec le cinéma qui n’est finalement qu’une succession d’images fixes.
L’artiste américain Jason Shulman avait déjà réalisé des photographies grâce à une très longue exposition des reportages télévisés consacrés aux attentats du 11 septembre 2001, curieux de voir s’il en résulterait un élément significatif au regard de ses propres souvenirs médiatiques de l’événement.
En 2014, il renouvelle l’expérience sur les mouvements des sportifs aux Jeux Olympiques de Sotchi, ce qui lui donne l’idée de réaliser le projet Photographs of films (ndlr: Photographies de films ). Laissant ouvert, pendant toute la durée de la projection, l’obturateur de son appareil photo placé devant un moniteur haute résolution, il a capturé en une seule image l’intégralité de longs métrages emblématiques du cinéma populaire.
Cette accumulation de centaines de scènes en une seule image révèle une supra image résumant l’intégralité de l’histoire, de son début à sa conclusion, riche de toutes les péripéties qui la compose. Le résultat est une forme abstraite de nuées colorées ou grises d’où émerge parfois une nouvelle figure évocatrice au gré de l’interprétation de nos cerveaux. Nous sommes ainsi faits que notre œil va inconsciemment chercher à reconnaître un élément familier qui serait la quintessence de l’œuvre ou son sens caché.
C’est frappant avec L’Evangile selon Saint Matthieu de Pasolini où l’on peut voir nettement une figure christique, ce qui n’en est que plus approprié au vu du sujet de l’œuvre même si cela s’explique assez facilement par le fait que dans de nombreux plans les acteurs sont filmés en gros plan. Il est amusant de constater que l’on peut faire la même observation avec Gorge profonde ( Deep Throat en VO) film porno où l’extase n’est pas seulement mystique. A contrario, Mary Poppins ou Le magicien d’Oz dévoilent simplement des tâches rouges sur fond bleu et vert.
« Il y a environ 130 000 images dans un film de 90 minutes », déclare l’auteur, « et chaque image de chaque film est enregistrée dans ces photographies. Vous pourriez prendre toutes ces images et les mélanger comme un jeu de cartes, et peu importe le mélange, vous obtiendriez la même image que celle à laquelle je suis arrivé. En gros, chacune de ces photos montre le code génétique du film, son ADN visuel. »
Gilles Courtinat
Toutes les chroniques de Gilles Courtinat
Le site de l’artiste
Dernière révision le 9 octobre 2024 à 9:41 am GMT+0100 par
- Kiana Haveri & Melissa Cornet
No Woman’s Land, Prix Carmignac du photojournalisme - 25 octobre 2024 - Olivier Jobard
Notre famille afghane, souvenirs d’une vie envolée - 18 octobre 2024 - Prix Bayeux Calvados-Normandie
Le palmarès 2024, de l’Ukraine à Gaza - 18 octobre 2024